Amicale des Anciens élèves du lycée Arago de Perpignan - AAA

Hélène Legrais, notre amie Ancienne d'Arago, raconte Mai 68 à Perpignan sur france Bleu Roussillon (mai 2024)

Hélène Legrais, notre amie Ancienne d'Arago, raconte Mai 68 à Perpignan sur france Bleu Roussillon (mai 2024)
Le premier article paraît dans l’Indépendant le 4 mai : « Violentes bagarres entre étudiants et policiers hier au Quartier latin ». Le journal souligne un « fait tout à fait exceptionnel » : les forces de l’ordre ont pénétré dans la Sorbonne. Et deux jours plus tard « agitation universitaire ». Personne n’imagine alors que c’est une lame de fond qui va tout emporter. Les affrontements entre manifestants et CRS se multiplient, pavés contre lacrymo. Paris se hérisse de barricades … mais pas seulement ! L’agitation gagne la province. A Perpignan, les étudiants adoptent plusieurs motions de soutien et une délégation est reçue à la Préfecture. Le 11 mai, ils font grève et défilent en ville au côté des enseignants et des universitaires, 500 personnes jusqu’à la place Arago pour un sit-in en écoutant les prises de paroles. Seuls les étudiants en Droit ne s’associent pas au mouvement. Les lycéens se joignent aux étudiants.
Et voilà que les syndicats ouvriers s’y mettent aussi.
« Etudiants, enseignants, travailleurs, tous unis » une grande manifestation rassemble dans le calme plus de 5 000 personnes le 14 mai à Perpignan. Les usines se mettent en grève et la crise prend de plus en plus de place dans les pages de l’Indépendant. Les Collèges littéraires et scientifiques élisent une assemblée constituante. Les Beaux-Arts sont en grève illimitée. Arrêt du travail à EDF-GDF. Grosses perturbations aux PTT et à la SNCF. A Perpignan, la gare est bloquée et occupée. Les cerises de Céret sont acheminées vers la capitale en camion … mais les stations-services commencent à fermer, on manque de carburant. Les débrayages se multiplient dans les entreprises du département notamment à la dynamiterie de Paulilles et les mines d’Escaro, idem pour marins-pêcheurs et les dockers de Port-Vendres, et même les élèves de l’école d’infirmières, les banques restent fermées et les instituteurs n’assurent plus qu’une garderie. Les élèves de terminales du lycée Arago s’inquiètent pour leurs examens. Les rayon d’alimentation des grands magasins sont "dévalisés". L’Epargne, les Dames de France et les Nouvelles Galeries baissent le rideau. Les éboueurs ayant cessé le travail, on distribue des sacs en papier pour stocker les ordures ménagères. Le 27 mai, il n’y a plus d’essence. L’approvisionnement devient le souci n°1. Les ouvriers du bâtiment tiennent leur AG au Théâtre municipal. Nouvelle grande manifestation unitaire à Perpignan et meeting sur la place Arago. Pour la Cerdagne et le Capcir, le rassemblement a lieu à Font-Romeu. Le général de Gaulle annonce un référendum en juin pour rénover les structures de l’Etat. Un non entrainerait sa démission. Georges Pompidou lance les négociations de Grenelle ; elles sont houleuses.
Et soudain, le 29 mai, coup de théâtre !
De Gaulle reporte le conseil des ministres et disparaît ! On ignore où est le chef de l’Etat pendant 7h. On saura plus tard qu’il s’est rendu à Baden-Baden en Allemagne rencontrer le général Massu. Lorsqu’il revient, il reprend la main, ajourne le référendum et dissout l’Assemblée nationale. La mobilisation se poursuit néanmoins. La population contribue autant qu’elle le peut aux caisses de grève. Une nouvelle manifestation réunit 10 000 personnes à Perpignan. Mais le 30, c’est au tour des gaullistes de descendre dans la rue. A Perpignan, ils défilent derrière deux drapeaux tricolores frappés de la croix de Lorraine en criant « Libérez nos facultés », « Les cocos à Moscou », « réformes dans l’ordre ». Le week-end de la Pentecôte c’est la ruée vers le Perthus pour faire le plein. Des accords sont signés au fur et à mesure, les étudiants expulsés de la Sorbonne, les grévistes reprennent le travail et mai 68 s’éteint avec juin. Les candidats bacheliers passent juste un oral après avis du conseil de classe et on inaugure le 2e pont sur la Têt, le pont Arago … que les Perpignanais appelleront pendant des années tout simplement le pont neuf !

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